Did someone call for a mechanic ?

Did someone call for a mechanic ?
Brooklyn & Grace

Je suis programmée dans deux jours sur une mission ravitaillement au D4 – avec Zane, ça c’est cool et un 3e membre dont le nom n’est pas encore indiqué -, mais aujourd’hui… je suis assignée à une mission « courses ». Est-ce qu’ils ont établi une sorte de « pause » dans les missions après nous avoir envoyés à la Noix ? Je commence à le croire, parce que ce sont des missions dignes d’une jeune recrue, ce que je ne suis plus. Mais peu importe, je fais ce qu’on me dit quand les ordres viennent du D13, bien que ça ne me réjouisse pas des masses. En plus si je pouvais éviter les allers-retours comme ça… ça fait des jours que je n’ai pas chassé, mes réserves commencent à prendre cher. J’ai donc pris la liste de ce qu’on m’a demandé, puis le Cobra, discutant avec d’autres rebelles qui sont envoyés à droite ou à gauche. Et je découvre que certains ont des missions hyper sympas. J’échangerai bien, mais je n’ai pas envie que Sawyer me voit comme une gamine capricieuse qui ne fait pas ce qu’on lui dit. Je ne suis pas un petit génie mais ce qu’ils veulent, ce sont des pièces que je ne trouverai que chez un mécano. Peut-être que ce sont des pièces utiles pour le Cobra. Ou pour autre chose. Je ne pose pas de questions de toutes manières, je me contente de faire ce qu’on me dit. N’empêchent… ils auraient pu me trouver autre chose. Franchement, une mission courses ? Je pourrais croire à une mauvaise blague. Le train ralentit. Sac à dos sur l’épaule, je descends. Bon, le D6 c’est quand même LE district des transports, je suppose donc que ça ne sera pas trop difficile de trouver un garage qui pourra me renseigner sur la façon de se procurer les pièces sur la liste. J’en connais déjà deux ou trois à éviter, car pro-capitole. Et même s’il n’est pas écrit « liste de courses pour les rebelles », autant éviter de courir le moindre risque.

Je m’enfonce un peu dans les terres, essayant de me fondre complètement avec la population, évitant, comme eux, de croiser le regard des Pacificateurs qui circulent. J’avise alors un garage assez isolé, assez pauvre d’apparence, visiblement pas aidé par le Capitole.

« Bonjour ? »

Je ne vois personne dans l’atelier, étrange. Pourtant il y a du bruit… Une tête se redresse alors, avec un peu de cambouis sur le front. Une fille, à peine plus jeune que moi. Aussi blonde que je suis brune. Ça ne doit pas être la propriétaire… Quoique, ça ne veut rien dire, il suffit, comme moi, qu’elle ait perdu ses parents et la voilà à la tête d’un garage. On s’en fout après tout, je me rapproche d’elle, l’air le plus naturel possible.

« Je suis à la recherche de quelques pièces, j’aurais voulu savoir si vous en auriez ou si vous sauriez me dire où je peux me les procurer. »

Je lui tends la liste. Si je veux être honnête je ne connais pas les trois-quarts des noms qui sont inscrits. Mais logiquement, c’est son domaine à elle. J’espère juste que je ne serais pas obligée de courir partout pour tout trouver. C’est déjà assez nul comme mission pour en plus se compliquer la tâche. Plus vite je la finirai, mieux ce sera.

BY .SOULMATES

Did someone call for a mecanic?

Brook & Grace

Je resserrai un boulon, espérant que cette fois-ci serait la bonne. Je fais glisser la planche à roulette sur laquelle je m’étais allongée pour passer sous l’engin pour m’enfoncer un peu plus loin dans le mécanisme de celui-ci. Je ne voyais pas d’autre problème, il devrait démarrer… Je m’extirpe avec une souplesse acquise grâce à l’expérience de sous l’engin. Je fis le tour de la machine pour voir si tout était normal. C’était une belle pièce, j’en avais vu que très rarement : il s’agissait d’une cellule de secours, au cas où l’hovercraft aurait un problème et ne pouvait pas se poser. Il ne servait qu’à l’atterrissage en cas d’urgence, il n’était que très peu utilisé mais en cas de besoin il devait être parfaitement opérationnel. Je m’assis à l’intérieur et appuya sur le bouton censé allumer le moteur.

▬ Ok mon chou, maintenant tu vas me montrer ce que tu as dans le ventre.

Le moteur resta silencieux. Profitant que le garage soit vide, je pestais à voix haute, avant de retourner sous la machine. Je voulais terminer de le réparer avant ce soir, ou au moins trouver le problème. Concentrée au maximum sur le fouillis innommable qu’était censé être le câblage de démarrage de la machine, je n’entendis pas la sonnette du garage annoncer un client. Je sursautais donc –me cognant le front au passage- lorsqu’une voix résonna dans la boutique :

▬ Bonjour ?

Prise au dépourvu, je sortis maladroitement de ma cachette, massant mon front douloureux.

▬ Bonjour, je peux vous aider ?

Je rangeais mes outils alors qu’elle se rapprochait. Elle devait avoir mon âge, mais je ne me rappelais pas l’avoir croisée un jour à l’école, ou même dans le district.

▬ Je suis à la recherche de quelques pièces, j’aurais voulu savoir si vous en auriez ou si vous sauriez me dire où je peux me les procurer.

Elle me tendit une liste que je parcourais d’un coup d’œil.

▬ Tu as de la chance, il me semble que nous avons tout ici. Laisse-moi deux minutes et je t’apporte ça.

Le tutoiement m’avait échappé sans que je ne m’en rende compte, il me semblait étrange de vouvoyer quelqu’un de mon âge. Tout en gardant la liste, je me rendis en arrière-boutique où la plupart des pièces étaient entreposées. Méthodiquement, je ramassais les pièces demandées.

Je retournais voir la cliente les bras chargés de ce dont elle avait besoin. Je les posais sur le comptoir de manière à ce qu’elle puisse les étudier et me dire si elles lui convenaient.

▬ Qu’est-ce que tu vas faire avec ça ? La plupart sont des pièces communes, mais il y en a d’autres que je n’ai jamais utilisé, je ne sais même pas à quoi elles servent…

J’étais curieuse, la question m’avait échappée et je me rendis compte trop tard que ce n’était pas à moi de poser la question. J’essayais de me rattraper maladroitement :

▬ Enfin, sauf si c’est classé secret défense, évidemment, je ne veux pas me mêler de ce qui ne me regarde pas !

Bon, en espérant n’avoir pas fait fuir une nouvelle cliente, j’attendais son accord pour les pièces que je lui avais apporté.

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Brooklyn & Grace

Je ne connais pas la plupart des choses que je vois ici. Les engins ne viennent que très rarement au Douze, quant aux hovercrafts, je ne les ai jamais vus que dans le ciel. Chez moi, on ne peut pas dire que ce soit un district très technologique. De la chance. Oui, c’est fou ce que j’ai de la chance, une mission courses, c’est vrai que c’est top. Bon d’accord, je râle un peu trop, s’il y a tout ici, c’est déjà ça de pris. C’est marrant, cette façon qu’elle a, cette familiarité. Je ne m’attends jamais à ça dans ces districts. Il faut dire que pour moi, plus on se rapproche du Capitole, plus on est parasité par leurs manières. Il n’y a que Zane qui fasse exception.

Alors qu’elle est partie en quête des trucs notés sur ma liste, je regarde autour de moi. Vraiment un domaine que je ne maitrise pas. Pourtant, ça rend de fiers services, il suffit de voir tout ce qu’on est capable de réaliser grâce au Cobra. Mais je n’ai jamais appris et je dois reconnaitre que je ne pense pas avoir les capacités d’apprendre, vu que j’ai dû quitter l’école très tôt pour travailler dans la mine avec mon père ou chasser.

Déjà la voilà qui revient. Histoire de me donner un semblant de prestance, je tourne les pièces entre mes mains. Sérieusement, je sais que c’est pour le Cobra, mais j’ai zéro idée de ce que c’est vraiment. Zut, et il fallait évidemment qu’elle pose la question. Trouve quelque chose Brooklyn, trouve quelque chose.

« Je pourrai te le dire… mais je serai obligée de te tuer après. »

Je lui souris après avoir pris un regard sombre et sévère. En tout cas, sa prudence m’amuse. Elle est spontanée mais pas idiote.

« Alors je ne vais pas essayer de te mentir… je n’ai pas la moindre idée de ce que sont ces pièces et de ce à quoi elles servent. »

Bon, par contre, pour la suite, je vais mentir un peu. Et le seul mensonge qui me vient à l’esprit me fait du mal, mais quand il faut…

« C’est pour mon frère, il adore bricoler des trucs auxquels je ne comprends rien. Mais je l’adore, alors quand j’ai vu sa liste, je me suis dit que je pourrai lui faire ce cadeau. »

Ça me tord toujours l’estomac quand je raconte des trucs comme ça. Parce que mon frère n’est plus là depuis trois ans, qu’il ne sera jamais plus là, parce que je l’ai vu mourir comme tout Panem en direct. En plus, c’était un bricolo surtout pour les pièges, pas vraiment pour la mécanique. Faut dire que chez nous… La seule chose de vraie dans tout ce bobard, c’est que je l’aurais fait, s’il avait été en vie et passionné. J’aurais troqué tout ce que je pouvais contre ces pièces. Mais aujourd’hui, ce n’est pas pour mon frère que je fais ça. C’est pour rendre Panem libre. J’entends du mouvement à l’extérieur et en tendant le cou, j’aperçois des Pacificateur qui font leur ronde.

« Ça grouille en ce moment. Tu crois que c’est à cause des Hunger Games ? »

Il y a eu du mouvement dans le district d’après XX, suite aux différentes morts, et c’est vrai que ça commençait à remuer, j’en sais quelque chose. Mais si un truc autre se trame, ça serait bien de le savoir.

« Désolée, tu connaissais peut-être les tributs et le mentor ? »

Je sais mieux que quiconque que les tributs ne sont pas des êtres venus de nulle part, qu’ils sont des fils et des filles, des frères et des sœurs, des fiancés et des petites-amies. Mais en plus, ils ont perdu le mentor. Je me souviens encore de la peur que j’ai ressentie quand ils ont demandé à Melvil s’il voulait accompagner les tributs. Déjà si ça avait été moi comme nous le pensions, je ne l’aurais pas voulu, alors là… Cette règle était vraiment faite pour éliminer les mentors. Quel soulagement qu’il n’y soit pas allé…

BY .SOULMATES

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Brook & Grace

▬ Je pourrai te le dire… mais je serai obligée de te tuer après.

J’esquissais un sourire nerveux. Je ne savais pas si elle plaisantait, mais elle avait le droit d’être énervée, il fallait que j’apprenne à me mêler de mes affaires. Elle sourit à son tour, sincèrement, et je me sentis rassurée.

▬ Alors je ne vais pas essayer de te mentir… je n’ai pas la moindre idée de ce que sont ces pièces et de ce à quoi elles servent. C’est pour mon frère, il adore bricoler des trucs auxquels je ne comprends rien. Mais je l’adore, alors quand j’ai vu sa liste, je me suis dit que je pourrai lui faire ce cadeau.

Je sentis mon cœur se serrer lorsqu’elle évoqua son frère. Je m’infligeais une claque mentale : je ne pouvais pas me permettre d’être sentimentale à chaque fois que quelqu’un prononce le mot « frère », ou je ne m’en sortirais pas.
Heureusement, elle change aussitôt de sujet, et en jetant un coup d’œil à l’extérieur elle reprit la parole :

▬ Ça grouille en ce moment. Tu crois que c’est à cause des Hunger Games ?

Je lançais un regard à mon tour, bien que je n’en ait pas besoin : on pouvait entendre distinctement la marche rythmée des pacificateurs passer dans la rue en face de la boutique.

▬ Je ne suis pas sûre, mais il me semble que ça avait commencé un peu avant les Jeux. Peut-être en prévention.

Je n’y avais jamais prêté réellement attention, mais c’est vrai qu’ils semblaient un peu plus nombreux que d’habitude. Le son de leurs bottes sur le goudron résonnait plus fort qu’avant. Mais c’est sûrement parce que je n’avais jamais fait attention.

▬ Désolée, tu connaissais peut-être les tributs et le mentor ?

Sa question me surprit, presque autant que ses excuses. Je n’avais aucun mal à parler des Hunger Games et des tributs, ce n’était, contrairement à d’autres personnes, pas du tout un tabou pour moi. Peut-être parce que je n’ai jamais connu quiconque mort dans l’arène.

▬ Non, ne t’inquiètes pas, je ne connais pas ceux de cette année. En fait, je crois que je suis assez chanceuse, je n’ai jamais connu…

Je me coupais brusquement, de peur d’être maladroite. Si je n’avais connu personne, statistiquement il y avait de grandes chances pour que elle, oui. J’essayais d’éviter un moment de malaise en me rattrapant maladroitement :

▬ Je ne connais personne cette année. Je ne suis pas non plus trop les Jeux cette année, mais le petit Aedan a l’air de bien s’en sortir.

Je rajoutais d’une petite voix mal assurée, plus par politesse qu’autre chose –je craignais de connaître sa réponse :

▬ Et toi ? Tu connaissais quelqu’un ?

Mauvaise question. Je m'en étais rendue compte en la prononçant. J'enchaînais aussitôt, comme si la question n'avait aucune importance -et la réponse encore moins. Je repris la parole, en faisant semblant de bomber le torse:

▬ En tous cas soit sur que ton frère sera plus que ravi en voyant ces pièces, elles sont toutes de très bonne qualité. Tu as bien fait de venir ici, tu ne trouveras pas mieux ailleurs.

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Brooklyn & Grace

Mentir, tricher, c’est devenu comme une seconde nature avec le temps. C’est magique comme il devient facile de raconter des bobards, de partir de la réalité pour la changer complètement. Aujourd’hui, je fais comme si Blake était vivant, ce qu’il n‘est plus depuis trois ans. Au début, je n’aurais pas supporté de me servir de lui. Blake est sacré. Mais aujourd’hui, le sacré tient surtout dans mes habitudes, comme la maison demeurée inchangée depuis tout ce temps et le matelas sur lequel je ne peux plus dormir.

Et sa mort a engendré ma colère. Ma colère a provoqué un meurtre. Ce meurtre m’a fait entrer dans la Résistance. La Résistance m’a amenée ici aujourd’hui. En lutte contre ces êtres qui paradent là, dehors, qui marchent en cadence. Je déteste tellement ce qu’ils incarnent… Le district est en deuil, il est en colère, il y a de quoi. Et ils ne laissent aucun répit. Pas de compassion, ce ne sont que des gamins qui crèvent pour amuser le Capitole.

« En prévention ? Tu crois qu’il pourrait se passer quelque chose ? »

Je fronce les sourcils. Le D6 couvrirait-il quelque chose ? Des prémisses d’une révolte qui gronderait de façon sourde ? Ce serait une information particulièrement utile, si le D6 est prompt à rejoindre notre cause. Avec leurs talents, nous pourrions faire de grandes choses. Peut-être que les dernières nouvelles en provenances de Hunger Games a éveillé la colère des habitants. Mais je me rends compte que je suis maladroite, je sais ce que c’est que de perdre quelqu’un dans les Jeux. Certaines familles sont épargnées, après tout, chaque année, ce ne sont « que » deux gosses d’un district… Deux ce n’est pas grand-chose à notre échelle. Mais seulement deux, ça peut aussi tout changer.

« Puisse le sort lui être favorable », selon la formule consacrée. Autant envers Aedan qu’envers cette fille qui a donc été épargnée.

Pas comme moi, et sa question, doux retour à l’envoyeur me le rappelle. J’aimerais, là, que ce soit aussi facile de mentir que précédemment. Après tout, aujourd’hui, je joue le rôle d’une fille du D6 qui cherche des pièces pour son frangin. Cette fille là a certainement été épargnée aussi par la vie. Je joue un rôle. Sauf que là, ce n’est pas si facile, parce que j’aurais l’impression de nier l’existence de Blake et la réalité de ce qui lui est arrivé. Et c’est hors de question. Heureusement, elle a l’intelligence de passer à autre chose, sauf que ça me torture tout autant, la faute au mensonge magique.

« J’ai connu quelqu’un… Mais pas cette année. »

Je lui souris.

« Ouais, je sens qu’il va s’éclater avec tout ça, alors que moi je n’y comprends strictement rien. Il construirait un train avec trois fois rien. Je suis un peu le mouton noir de la famille, à ne rien n’y toucher en mécanique. Mais je te crois sur parole pour les pièces. J’ai entendu que du bien de ce garage. »

Le bruit dehors ne faiblit pas. Les Pacificateurs sont toujours bien présents. Un peu trop à mon goût. Impossible de repartir tranquillement avec un tel chargement. Par contre, je tiens une occasion d’en apprendre davantage sur cette fille et sur le D6. On a bien besoin de mécaniciens de talent, que ce soit pour le Cobra ou comme saboteur. Autant tâter le terrain pour orienter ensuite les rebelles plus anciens vers cette zone… ou au contraire, la déconseiller.

« Tu travaillais sur quoi quand je suis rentrée ? Et si je peux abuser de ta générosité… », une idée me traverse l’esprit, si jamais elle ne représente pas une recrue potentielle. « Qu’est-ce que je peux t’échanger pour que tu m’apprennes à piéger mon frangin ? J’aimerais bien qu’il cherche des heures ce qui ne marche pas dans son truc sachant que ce sera juste moi qui lui aura piqué la pièce qu’il faut. C’est pour toutes les fois où il s’est moqué de moi. »

Je lui adresse un sourire complice. Si elle a un frère, elle comprendra forcément.

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Brook & Grace

▬ En prévention ? Tu crois qu’il pourrait se passer quelque chose ?

Je lui assurais précipitamment :

▬ Non non bien sûr, en tous cas maintenant il ne peut plus rien se passer… Disons que je pensais qu’avec l’Expiation, la nouvelle règle et tout ça, ils ont pensé renforcer la sécurité pour éviter tout débordement.

Je récitais plus ou moins ce que l’on nous avait rabâché encore et encore pour justifier la présence toujours croissante des pacificateurs, et vu que cela m’avait semblé logique et légitime, je ne m’en étais pas plus formalisée.
Malgré mon changement maladroit de sujet, elle répond à ma question. Pas de bon cœur, mais elle le fait. Je m’en voulais d’autant plus d’avoir posé la question lorsqu’elle m’offrit sa réponse :

▬ J’ai connu quelqu’un… Mais pas cette année.

Elle enchaîna tout aussi rapidement que moi, et je lui en étais reconnaissante. Je ne voulais pas créer de malaise –je ne voulais pas perdre un potentiel client régulier mais, surtout, il n’était certainement pas dans mes intentions de remuer le couteau dans la plaie.

▬ Ouais, je sens qu’il va s’éclater avec tout ça, alors que moi je n’y comprends strictement rien. Il construirait un train avec trois fois rien. Je suis un peu le mouton noir de la famille, à ne rien n’y toucher en mécanique. Mais je te crois sur parole pour les pièces. J’ai entendu que du bien de ce garage.

Mon orgueil se gonfla avec le compliment. Elle continua, dissipant définitivement le malaise qui avait failli s’installer.

▬ Tu travaillais sur quoi quand je suis rentrée ? Et si je peux abuser de ta générosité… Qu’est-ce que je peux t’échanger pour que tu m’apprennes à piéger mon frangin ? J’aimerais bien qu’il cherche des heures ce qui ne marche pas dans son truc sachant que ce sera juste moi qui lui aura piqué la pièce qu’il faut. C’est pour toutes les fois où il s’est moqué de moi.

Mon cœur se serra en même temps qu’un sourire s’installa sur mes lèvres. L’assaut de ses deux sentiments contradictoires n’était pas nouveau mais me mettait mal à l’aise à chaque fois. C’était exactement le genre de chose que je faisais à Romain, qui le faisait rager un temps mais surtout qui nous faisait autant rire l’un que l’autre. Ces moments me manquaient plus que tout. Si je pouvais aider cette fille à faire la même chose, peut-être retrouverais-je un peu de ce sentiment…

▬ Avec grand plaisir ! Je travaillais sur une commande du Capitole, mais ils l’ont demandé pour la semaine prochaine, ça peut attendre un peu. Montres-moi un peu ce que tu as là et je vais te dire comment tu peux piéger ton frère.

Je regardais avec plus d’attention les pièces qu’elle m’avait commandées. J’en choisis une et la lui tendit :

▬ Regarde celle-là, elle n’est pas très compliquée, c’est le tuyau d’échappement qui est relié au moteur. Pour fonctionner, il doit être parfaitement propre, mais vu qu’il n’y a aucune raison qu’il s’encrasse personne ne le vérifie jamais. Alors ce qu’on peut faire…

Je m’interrompis un instant et me pencha sous le comptoir pour y prendre une pièce de monnaie, dont le diamètre avait celui du tube.

▬ Tu peux mettre la pièce dans le tube, de manière à ne laisser rien passer. Après impossible de faire démarrer quoi que ce soit. Le tube est opaque, il ne pourra pas voir la pièce, et vu que le matériel n’est pas complètement rigide, il te suffira de souffler dedans pour l’enlever.

Pendant que je parlais j’avais enfoncé la pièce dans le tube, et une fois mes explications terminées je soufflais dans celui-ci pour lui montrer. La pièce se libéra sans difficulté et roula quelques mètres plus loin. Je m’éloignais pour aller la ramasser et lança :

▬ Alors, qu’est-ce que tu en dis ? J’aimerais voir la tête de ton frère lorsque tu résoudras son problème en deux secondes alors qu’il aura galéré pendant je ne sais pas combien de temps.

Je jetais un coup d’œil à l’horloge à côté du comptoir. J’avais une ou deux heures devant moi avant que Giuliano ne rentre pour fermer la boutique, et je n’avais aucun réparation pressente. Je proposais spontanément à la demoiselle en face de moi :

▬ Si tu veux je peux t’apprendre deux trois trucs. Rien de bien sorcier, juste les bases, pour comprendre un peu de quoi ton frère parle.

petite précision: