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HRP :
Spoiler:

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They tell us everything's alright
and we just go along.
How can we fall asleep at night?
when something's clearly wrong.

Ethan faisait les cent pas en attendant qu’un de ses deux Tributs veuille bien se montrer. L’idéal serait que les deux arrivent, mais le Mentor n’en demandait pas tant, la surprise semblant être un des points forts du District Dix. Il devait reconnaître que la Parade avait été une surprise, elle l’était toujours, et Mentors comme Tributs avaient tendance à l’oublier : pourtant, c’était le moment le plus agréable des Jeux. Et si Jason et Chloé n’avaient pas brillé comme l’avaient fait les Tributs du Un, ils ne déméritaient pas, surtout au vue des commentaires de Selena sur la pauvreté des Districts – si elle pouvait se taire celle là…
Armé de son café, seul rempart entre le réveil et le sommeil, Ethan réfléchissait. Une chose le chiffonnait particulièrement : pourquoi autant de Tributs liés ? Le tirage au sort était un fait du hasard et, exceptés pour les Districts de Carrières où le volontariat et les entraînements changeaient la donne du hasard, comment expliquer la surprise qu’avait semblé le Tribut masculin du Quatre ou le tirage au sort de sa partenaire ? Comment expliquer la crise de larmes de la fille du Cinq, cette proximité trop ambiguë entre le frère et la sœur, ou entre ceux du Quatre… Comme si cet intitulé à propos du lien des Tributs avait commencé bien avant la Moisson…
Le constat était pourtant clair : le lien entre Chloé et Jason n’était pas aussi exceptionnel et rare qu’il aurait dû être.
Comment ? Comment faire pour le rendre plus intéressant ?
Ethan n’en avait aucune idée. Pour l’instant, il devait se concentrer sur les entraînements imminents. Jason en avait déjà suivi quelques uns, bien qu’il n’ait pas apprécié et continué, et semblait avoir d’autres compétences cachés. Pour Chloé, par contre, c’était plus compliqué… mais il avait une idée en tête, une idée qu’il fallait qu’il construise avec eux.
Quand la porte derrière lui s’ouvrit, il se tourna et but une gorgée de café.

Where we stand together ...

feat Chloé et Ethan ♪

La parade s'était achevée, enfin, la vue de tant de gens si colorés et farfelus mais surtout hystériques avait fatigué Jason. Si l'on rajoutait à ça ma moisson de la veille et le trajet en train particulièrement houleux, cela faisait beaucoup à encaisser. Et ce n'était que le début. Les entraînements étaient imminents, le lendemain pour être plus précis. Ils auraient 3 jours pour apprendre un maximum de choses qui pourraient leur être utile dans l'arène, seulement c'était court, trop court. Alors leur mentor les avait convoqués si tôt le défilé terminé au centre d’entraînement. Ethan devait avoir prévu un petit programme pour chacun d'eux. Spécifique à Jason et à Chloé, enfin ce n'était que des suppositions, il n'en savait strictement rien. En tout cas tous les mentors ne devaient pas faire ça, il était heureux que le cow-boy prenne une tache aussi ardue que celle d'entraîner deux personnes comme eux.

Il était allé rapidement se changer, il n'y avait pas une minute à perdre et bien que la tenue était assez confortable il lui tardait de l'enlever. Il les troqua contre un bas de jogging et un simple t-shirt. Très épuré et simple pour une tenue provenant d'un placard du Capitole, enfin un peu de simplicité. Chloé avait fait de même et il se retrouvait donc seul. Une fois changé et débarbouillé du maquillage qu' Equinoxe sortit de sa chambre et alla au lieu du rendez-vous.

Il toqua très discrètement, si doucement qu'on n'avait pas dû entendre le toc toc. Ethan se retourna et bu une gorgée de café. Une grande histoire d'amour avec cette boisson visiblement, ils s’étaient vu une paire de fois et jamais l'homme ne s'était séparé de sa tasse avec le précieux contenu. Il paraissait soucieux ou plutôt il faisait marcher ses méninges et son regard fatigué fixait le nouveau venu dans la pièce. Jason lui adressa un léger sourire mélancolique, il ne voulait pas perdre la face devant son mentor mais il lui tardait de pouvoir s'effondrer sur le lit, être seul pour pouvoir songer à son triste avenir. Il voulait se montrer fort devant Chloé et Ethan mais il n'en était incapable, il était faible, un oiseau fragile brisé par la vie et encore ce n'était pas fini. Seulement le début, le deuxième jour de la préparation au calvaire, l'acclimatement au prochain enfer qu'ils allaient vivre. Il n'osait rien dire, leur mentor avait-il vu qu'ils s'étaient rapprochés après le lâché des chiots ? Qu'allait- il dire ? Probablement rien, il n'avait pas l'air très bavard, c'était mieux pour tout le monde sauf au niveau des sponsors, mais c'était encore une autre histoire, ils avaient encore le temps, enfin encore un peu de temps, si peu ….

« Alors ... quel est le programme ? »

Il essayait de briser le silence et n'avait rien trouvé de mieux, ne voulant pas parler du défilé. Mais qu'allait répondre le cow-boy ?

Effacer les apparences...

Depuis que nous étions remontés de la parade, je m’étais isolée dans la chambre qui m’avait été attribuée, au dixième étage du centre des tributs. La montée de l’ascenseur de verre m’avait semblé durer une éternité. Aucun de nous n’osait réellement dire quelque chose, s’avancer sur l’effet que nous avions provoqué lors de notre défilé. Ce silence de plomb m’avait braquée encore davantage : laissée seule avec mon esprit je m’étais confirmée ma décision. A peine arrivés à notre étage, nous nous étions séparés avec pour seule directive de revenir rapidement pour un briefing de notre mentor. Mais au fond, nous avions tous besoin de faire le point avec nous-mêmes avant de nous lancer dans de quelconques discussions stratèges.

Lorsque j’étais entrée dans la chambre, à nouveau bien trop riche pour moi, je m’étais immédiatement sentie mal à l’aise, étrangère. Rien ici ne me correspondait… Tout était tellement aseptisé et en même temps se voulait si grandiose : les coussins de lit en soie, la parure de draps gris souris brodés de fils blancs, la grande baie vitrée impeccablement lustrée,… On ne sentait aucune vie ici. D’ailleurs, comment aurait-il pu en être autrement ? De toutes les jeunes femmes qui avaient séjourné dans cette pièce, aucune n’était sortie vainqueur des Jeux. Cela voulait tout dire.

Voyant mon reflet dans la vitre brillante sous les lumières éclatantes de la place attenante, je ne me reconnaissais pas. J’avançai encore de quelques pas, espérant que ce n’était que la distance qui me séparait de la véritable Chloé. Mais non. Ils m’avaient transformée à leur guise, souillée par leurs mains pleines de sang, défigurée… Ma main passa sur mon visage, le maquillage sous mes yeux s’étala sur toute ma joue laissant une trainée qui aurait pu faire penser à la marque d’une lame dans ma peau pâle. Peut-être aurais-je bientôt réellement une balafre à cet endroit ? Peut-être le coup suivant me tuerait-il ? Mon cœur s’accélérait, battait la chamade. Partant à reculons, je faillis trébucher sur la moquette trop impeccable et me tournai brusquement pour me précipiter dans la salle de bain aux murs blancs, entièrement carrelée. Pire qu’un hôpital. Mon souffle se faisait court. Mes mains s’attaquèrent à la capeline en peau de mouton de notre styliste qui m’oppressait soudain, m’empêchait de respirer, m’étouffait. Je ne supportais plus toutes ces choses étrangères, dérangeantes, toutes ces choses qui n’étaient pas moi.

Me débarrassant de toutes ses étoffes précieuses comme si elles n’étaient que de vulgaires chiffons, mes vêtements de la parade se retrouvèrent bientôt sur le sol glacé de la salle de bains. D’un coup de pied, je les repoussai dans un coin de la pièce et tombai à genoux sur le carrelage. Mon corps tout entier s’effondrait, je me sentais défaillir mais quand je vis mes mains, couvertes du maquillage que j’avais vainement tenté d’effacer, je me redressai soudain et courus vers la douche. Puis ce fut le trou noir…

Assise sur le lit après avoir passé une bonne demi-heure dans la douche complètement alambiquée à tourner plus d’une vingtaine de boutons dont certains avaient bien failli m’ébouillanter, j’étais désormais totalement anesthésiée, presque en phase dissociative. Mon rythme cardiaque et ma respiration avaient repris une allure normale même si mes mains tremblaient encore, seul élément repérable de mon malaise.

Peut-être avais-je eu besoin de ce moment de folie pour reprendre mes esprits, pour redevenir moi. Les larmes coulaient en silence sur mes joues désormais débarrassées de tout artifice. J’étais à nouveau Chloé, j’étais à nouveau moi-même si je savais que ce n’était pas pour longtemps et que, bientôt, je n’aurais plus l’occasion de me retrouver seule avec moi-même. Que bientôt des centaines de personnes auraient leurs yeux rivés sur des écrans pour voir les Hunger Games, pas pour me voir moi mais pour voir qui abrègerait les souffrances de la pauvre petite handicapée du district Dix. Même si j’avais décidé que ce n’était plus important, cela continuait à me toucher, à m’émouvoir, à me perturber. Pourtant, à chaque fois que je me demandais pourquoi j’avais fait ce choix de renoncer à toute aide, son visage embrumait toute ma vue et je savais pourquoi.

Serrant les mains sur le jean que j’avais passé et qui était surmonté d’un tee-shirt rose pâle sur lequel j’avais assorti un gilet en laine grise, je me levai et m’avançai vers la porte. Derrière moi, la pluie tambourinait calmement sur la vitre, avec une régularité prévisible, apaisante… J’essuyai avec ma manche les dernières larmes qui m’avaient échappées et je poussai la porte de ma chambre pour gagner la salle commune de nos appartements. Dans la vaste pièce, Ethan avait l’air préoccupé, pensif. Une tasse de café à la main, son visage était tourné vers Jason qui ne devait pas être arrivé il y a très longtemps.

- Alors… Quel est le programme ? venait de lancer Jason à leur mentor qui s’arrêta dans son mouvement pour se concentrer sur Jason.

Je fis quelques pas supplémentaires pour me retrouver plus proche du centre de la pièce et de la table de marbre qui y trônait : encore un truc bien trop prestigieux pour nous, trop froid aussi… Comme nos corps bientôt mutilés…

- Vous… Vous vouliez qu’on vienne pour les entraînements, c’est bien ça ? demandai-je sans affronter son regard pendant que je me servais un verre d’eau froide, espérant que le conseil du mentor fonctionnerait une seconde fois.

J’avais été dure avec lui dans le train, mais je le devais si je ne voulais pas qu’il me choisisse. Car, j’en avais conscience, tôt ou tard les mentors devaient faire un choix : miser sur un de leurs chevaux et il ne fallait pas que je sois celui-ci… Pourrait-il le comprendre ?

Dès que Jason mit un pied dans la pièce, Ethan se tourna vers lui et vit Chloé arriver à son tour. Elle semblait… absente, légèrement effacée, enfin pas aussi énergique que ce qu’elle avait déjà démontré. L’autre Tribut ne la voyant pas, il lança la conversation :

« Alors... quel est le programme ? »

Il le fixa un instant en tentant de mettre de l’ordre dans ses idées. Pendant ce temps, Chloé s’approcha, silencieuse et incertaine : on était bien loin de la jeune révoltée du train. Ethan eut un doute profond sur ce qui pouvait bien la chagriner, ce qui lui demanda une certaine réflexion pour mesurer ses mots et éviter une nouvelle scène. La voix qui prononça les mots suivants fut pourtant timide :

« Vous… Vous vouliez qu’on vienne pour les entraînements, c’est bien ça ? »

Elle hésitait, fuyait le regard, doutait. Ethan se trouva tellement surpris qu’il prit moment pour répondre :

« Oui, je pense qu’on a besoin d’en discuter un peu… A moins que vous n’ayez des idées ? »

D’un geste de la main, il les invita à prendre place tandis que lui s’asseyait sur la table. Les évènements s’enchaînaient de manière semblable à ceux du train, et il espérait sourdement que ça se passerait mieux.

« J’y ai un peu réfléchi et, au vue de la Parade et des Moissons, j’en suis arrivé au constat suivant : vous n’êtes pas les seuls Tributs qui sont proches depuis longtemps. »

Un soupir franchit ses lèvres.

« On va tout de même continuer de vous présenter comme une équipe – de toutes les façons, je n’ai pas l’impression que vous comptiez vous séparer et que cela vous serez profitables. Il nous faudrait juste le rendre particulier, je vous fais confiance dessus. »

Les deux Tributs y étaient déjà arrivés, peut-être sans s'en rendre compte, dans la sincérité de leur relation. Finissant sa tasse, le Mentor conclut :

« Je souhaitais savoir si vous aviez déjà certains talents. Légaux, naturellement. »

Il précisa ce point parce qu’il rencontrait souvent des chasseurs… chose lucrative dans les plaines du Dix mais pas des plus licites.

Where we stand together ...

feat Chloé et Ethan ♪

Sans que Jason s'en aperçoive, Chloé était entrée à son tour. C'est sa voix qui avait révélé sa présence.

- Vous… Vous vouliez qu’on vienne pour les entraînements, c’est bien ça ?

En effet, c'était ce qu'Ethan leur avait demandé, de le rejoindre juste après la parade dans la salle commune pour commencer leur entraînements respectifs. Ils devaient débuter le plus tôt possible, mais 3 jours c'était court même en s’entraînant 12 heures par jour, un agneau ne deviendrait jamais un loup féroce. C'était un peu inutile, enfin on pouvait toujours essayer d'apprendre deux trois mouvements de combats, ou des plantes ou encore faire des pièges quand on n'avait jamais chassé. Mais on ne pouvait pas faire tous les ateliers et encore moins tout apprendre, il fallait être un carrière pour ça. Or ils ne l'étaient pas et ils ne le seraient jamais. Il se rappela les entraînements que sont père voulait lui faire suivre, ceux qu'il avait toujours refusé. Il regrettait maintenant d'avoir décliné ses offres, cela aurait été utile mais il ne voulait pas s'abaisser au rang des carrières qui s’entraînaient à tuer pour la gloire. Il aurait été peut être différent, moins faible, mais au moins il était resté lui, et ça son père n'aurait jamais pu lui ôter. Il était né Jason et mourrait Jason, tel qu'il était, voilà quel était son deuxième vœu le plus cher après celui de garder Chloé en vie.

-Oui je pense qu'on a besoin d'en discuter un peu.... A moins que vous n'ayez des idées ?

Oui ils devaient en discuter, les entraînements démarraient le lendemain, il devaient savoir vers quel atelier s'orienter, quelle attitude avoir, vers quels tributs aller, ou des futilités qui pourraient avoir une importance particulière. Pour ce qui était des idées, il n'en avait pas vraiment, il avait pensé à aller vers les ateliers de combats mais il respecterait la décision du cow-boy qui, il espérait serait pleine de sagesse et cohérente avec leur stratégie.

-Pas vraiment non …

Puis Ethan les invita à s’asseoir, Chloé son verre d'eau fraîche à la main et lui s'installèrent en face du mentor.

-J'y ai un peu réfléchi et, au vue de la Parade et des Moissons, j'en suis arrivé a constat suivant : vous n'êtes pas les seuls Tributs qui sont proches depuis longtemps.

Il avait raison, ceux du quatre par exemple qui semblaient se connaître, ou bien les carrières soudés du 1. Certes ils n'étaient pas les seuls, mais au moins leur relation était vraie, sincère, naturelle, pas comme tant de faux couples créé par stratégie dans l'arène comme l'on avait pu en voir tant. Il acquiesça mais sans rien dire.

-On va tout de même continuer à vous présenter comme une équipe de toute les façons, je n 'ai pas l'impression que vous comptiez vous séparer et que cela vous serez profitables. Il nous faudrait juste le rendre particulier, je vous fais confiance dessus.

Non, ils ne se sépareraient pas, il resterait avec elle jusqu'à ce que son cœur s'arrête, jusqu'à son dernier souffle, jusqu'à que Jason C. Drake soit parti définitivement. Il ne l'abandonnerait pas, et il espérait qu'elle accepterait son aide et sa protection, de toutes les manières, elle n'avait pas le choix. Le rendre particulier. Jason tourna la tête vers Chloé et la regarda droit dans les yeux et lui offrit un sourire discret au coin des lèvres, tellement discret qu'il se remarquait à peine. Saurait elle le déceler, en tout cas il observait chacun des traits de son visage pour la énième fois et s'émerveilla une fois de plus sur leur beauté. Ethan finissa sa tasse désormais vide qu'il posa délicatement sur la table.

-Je souhaitais savoir si vous aviez déjà certains talents. Légaux, naturellement.

Il avait insisté sur le fait de la légalité, faisant sûrement référence au moment dans le train ou Jason en avait trop dit au sujet de son père et du tirage au sort truqué. Il comprit alors qu'il ne devait pas parler de ses talents de chasseurs. Chose très pratiquée au 10 bien qu'interdite par la loi. Cependant, il sentait qu'il devait lui en parler, avec des messages subliminaux peut être, ou des allusions subtiles. Si l'on omettait la chasse, il ne savait rien faire, à part semer le malheur autour de lui comme avec Chloé, ou décevoir les gens autour de lui. C'était un bon à rien, tout simplement.

-Pas vraiment non, je passe mes journées à ne rien faire souvent, ou alors je vais dans les bois et je fais ma ronde habituelle, mais je dois me faire une raison, la forêt ne changera pas en une nuit, pourtant je vérifie des points précis très souvent.

Aurait il comprit l'allusion à la tournée de relevage quotidienne des pièges ? Il aurait essayé du moins, il aurait voulu lui dire directement, mais des micros devaient être planqués un peu partout. Un soupir franchisa ses lèvres.

-Enfin, peut être devrais-je parler au passé de mes aventures forestières ...

© Jawilsia sur Never Utopia

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Accepter ou lutter...

Mes esprits me revenaient peu à peu au fur et à mesure que l’eau fraîche glissait dans ma gorge, comme si elle revivifiait la moindre parcelle de mon corps, dynamisait mes pensées. Finalement le mentor avait peut-être de bons restes avec ses conseils basiques, presque risibles de prime abord. Je levai les yeux vers lui, écoutant ses paroles :

- Oui, je pense qu’on a besoin d’en discuter un peu… A moins que vous n’ayez des idées ? disait-il sur un ton que je ne lui connaissais pas, comme s’il avait été pris au dépourvu.

Surprise également par sa réaction, je mis un petit temps avant de faire non de la tête pendant que Jason avouait lui aussi n’avoir aucune idée pour améliorer nos chances de survie grâce à l’entraînement. Visiblement, les possibilités qui s’offraient à nous étaient minces : notre ignorance de la réalité des jours qui allaient suivre était certainement en cause, même si je doutais qu’on puisse faire de nous des guerriers sauvages en si peu de temps. Des guerriers susceptibles de faire face aux carrières surentraînés. C’était une façon de plus pour le Capitole de se donner bonne conscience. Après tout, pouvoir argumenter qu’il nous avait donné des clefs pour l’arène avant de nous envoyer à la boucherie permettait peut-être à ces « braves gens » de mieux dormir dans leur lit la nuit…

D’un geste, Ethan désigna les fauteuils qui trônaient autour de la table sur laquelle il s’assit. Ainsi en hauteur, il prenait une posture de maître et nous d’élèves obéissants. Autant je haïssais cette position paternaliste qu’il tentait de prendre avec nous, même si cela partait d’une bonne intention. Cependant, il avait une vision différente de la nôtre. En choisissant de se tenir à l’écart des Jeux, cela lui permettait de se placer à l’extérieur de la situation, même si cela ne devait pas être aisé, et donc d’avoir un autre angle d’approche largement agrémenté par son expérience.

- J'y ai un peu réfléchi et, au vue de la Parade et des Moissons, j'en suis arrivé a constat suivant : vous n'êtes pas les seuls Tributs qui sont proches depuis longtemps, finit-il par déclarer.

Cela n’était pas une bonne nouvelle, mais en attendais-je réellement une ? Un soupir franchit les lèvres d’Ethan un peu malgré lui, trahissant sa déception quant à cette donne.

- On va tout de même continuer à vous présenter comme une équipe de toutes les façons, je n'ai pas l'impression que vous comptiez vous séparer et que cela vous serez profitables. Il nous faudrait juste le rendre particulier, je vous fais confiance dessus.

Et voilà qu’il commençait à avoir tort… Enfin, pas totalement. Jason serait de son avis, il voulait rester avec moi : me protéger. Il l’avait explicitement annoncé dans le train et depuis notre arrivée, rien dans son comportement ne me laissait penser qu’il avait changé d’avis : bien au contraire. Et ce n’était certainement pas nos mains serrées et nos souffles si proches l’un de l’autre lors de la parade qui l’auraient détourné de son idée. Je pinçai les lèvres sans vraiment m’en rendre compte, j’avais tellement peur de lui nuire à mon tour…
A mes côtés, je sentis un mouvement de sa part. Je tournai la tête pour apercevoir ses yeux me fixer avec douceur. Le long de ses lèvres courait un sourire fugace, ce sourire qui était un véritable secret entre nous : un de ceux que nous seuls pouvions percevoir, apprécier, partager. Comme toujours, mon regard se baissait et le même sourire discret se percha sur ma bouche rosée. Il comptait tellement sur moi…

Mais il fallait que je me reprenne, je n’avais pas le droit de lui faire cela : pas maintenant, pas après la décision que j’avais prise. Le regard de notre mentor était posé sur nous, bienveillant. La dernière gorgée de son café avalé, il termina :

- Je souhaitais savoir si vous aviez déjà certains talents. Légaux, naturellement.

A nouveau concentrée sur ses propos, je haussai un sourcil. « Légaux ». Etions-nous donc si surveillés que cela ? Cette question était idiote et je me doutais bien de la réponse après nos révélations agitées dans le train… Le Capitole pourrait-il simplement nous punir de quelques talents que nous aurions et qui n’entreraient pas totalement dans les règles en vigueur dans notre District ? Dans tous les cas, la prudence étant mère de sûreté, mieux valait jouer le jeu d’Ethan.

- Pas vraiment non, je passe mes journées à ne rien faire souvent, ou alors je vais dans les bois et je fais ma ronde habituelle, mais je dois me faire une raison, la forêt ne changera pas en une nuit, pourtant je vérifie des points précis très souvent. commença par répondre Jason.

Il laissa un silence s’installer quelques secondes dans la pièce avant de ne parvenir à cacher son malaise, avouant malgré lui :

- Enfin, peut être devrais-je parler au passé de mes aventures forestières…

Ce cri du cœur résonna en moi comme une difficile vérité inébranlable. Il avait raison, c’était sans doute du passé… Dans ma poitrine, mon cœur se serra une nouvelle fois. Je refusais d’accepter l’évidence, tout mon être luttait contre cette réalité qui s’imposait à moi davantage d’heures en heures : Jason avait décidé de tout faire pour que je remporte la victoire et c’était la raison pour laquelle il était si défaitiste à son propos. Cependant, il était hors de question que les choses se passent ainsi, je m’y refusais.

- Il y a quelques années, nous faisions ces rondes ensemble… Mais il a toujours été plus doué que moi pour vérifier que tout était bien à sa place.

Du coin de l’œil, je jetai un regard à Jason. Je désirais tant qu’il prenne conscience de ses qualités, de ses atouts. Il fallait que ceux-ci se révèlent à lui avant que l’arène ne débute et qu’il se mette définitivement en tête des élans de héros sauveur qui ne feraient que le mettre davantage en danger, inutilement qui plus est.

Ma main toujours serrée autour de ce verre presque fini que je ne parvenais toutefois pas à lâcher, je redirigeai mon attention vers Ethan qui avait à présent reporté toute sa concentration sur moi comme s’il remarquait que je ne lui disais pas tout… Rien ne servait de cacher les choses, après tout peut-être en savait-il certaines ou bien Jason irait le trouver pour les dénoncer, lui qui me connaissait si bien. Je finis par abdiquer en me rendant compte que ne rien dire de ma personne consistait à m’avouer déjà vaincue et je refusais également cette option. J’allai me battre, mais sans incomber à personne.

- Sinon j’ai toujours été très douée en classe, mais je ne pense pas que cela m’aidera là où nous allons… dis-je me mordillant la lèvre sous l’effet de l’angoisse. Puis une idée me vînt et sans que j’ai le temps de peser le pour ou le contre de la révélation, les mots franchirent mes lèvres : Sinon ma grand-mère m’a appris pas mal de choses sur les plantes… Médicinales, toxiques… Mais aussi sur les soins de base, quand j’ai été blessée pour pouvoir refaire les pansements, les sutures si elles craquaient… J’ai de bons restes je pense.

J’avais fait une bêtise, j’avais moi-même avoué que j’étais capable d’avoir un intérêt dans l’arène. Jamais je n’aurais dû le dire. Avec cette annonce, Ethan nous encouragerait encore plus à rester en duo afin de nous compléter l’un l’autre. Seulement, même avec mes compétences dans le soin qui étaient quand même assez basiques, je savais que je ne serai pas d’une grande aide : pour l’être, il fallait que l’un de nous soit blessé et cela signait déjà le début de la fin… Pourquoi cette phrase m’avait-elle échappée ? Etait-ce cela qu’on appelait l’instinct de survie ? L’envie irrésistible de vivre qui nous poussait à vouloir nous en sortir même quand tout semblait perdu et que notre raison nous confiait d’autres priorités ?

Mes mains s’étaient crispées autour du verre pour l’une et sur le tissu de mon jean d’autre part. J’attendais la réponse de notre mentor tandis que je sentais le regard de Jason fureter de manière omniprésente sur mon visage.

Bingo. Jason avait saisi et jouait le jeu.

« Pas vraiment non, je passe mes journées à ne rien faire souvent, ou alors je vais dans les bois et je fais ma ronde habituelle, mais je dois me faire une raison, la forêt ne changera pas en une nuit, pourtant je vérifie des points précis très souvent. »

Un certain silence se passa, pendant lequel Ethan resta patiemment assis sur le bord de la table en attendant que Jason, qui semblait prêt à reprendre la parole, le fasse. Des rondes… il chassait. Lui, fils du chef des Pacificateurs, en avait-il besoin pour survivre ? Plus le Mentor en découvrait sur le père du jeune et plus il ne pouvait s’empêcher de ressentir un certain dégoût pour cet homme, dégoût qu’il chassait en se convainquant qu’il ne fallait juger personne. La preuve en était de ce garçon qui semblait capable de tuer des animaux et il se demanda bien quelle était son arme de prédilection.

« Enfin, peut être devrais-je parler au passé de mes aventures forestières… »

Cette phrase qui s’échappa des lèvres de Jason ne semblait pas destinée à Ethan et celui-ci conclut à l’expression soudain figée de Chloé que c’était entre eux. Mais son attention devait être concentrée sur Jason, se demandant de quelle manière il devait aborder le sujet de l’arme, sans forcément s’attendre à ce que ce soit la jeune femme qui apporte les fameux détails.

« Il y a quelques années, nous faisions ces rondes ensemble… Mais il a toujours été plus doué que moi pour vérifier que tout était bien à sa place. »

Donc, Jason posait des pièges. Le Mentor acquiesça. Une idée commençait à se dessiner quant à ce que Jason pourrait faire et il put alors reporter sa concentration sur Chloé, toujours prise par ses doutes et ses pensées. Et elle ne semblait vouloir donner aucun détail sur ce qui la tracassait tant.

« Je me doute qu’un potager peut avoir besoin d’une constante surveillance… la nourriture est une denrée importante qui manque vite, » avait déclaré Ethan en haussant les épaules.

Mais par quoi Chloé pouvait-elle être tracassée ? Etait-ce les incessants rappels au passé des deux Tributs ? Sa hanche qui l’élançait ? Une certaine peur de l’arène ? Le tout ? Autre chose ?
Chloé réussit néanmoins à prendre la parole, tendue.

« Sinon j’ai toujours été très douée en classe, mais je ne pense pas que cela m’aidera là où nous allons… »

Un sourire étendit les lèvres d’Ethan. Il ne s’attendait pas à une telle évocation, puisque l’intelligence de la jeune femme devait être combinée avec une capacité ; de plus, il n’avait pas lui-même été un très bon élève à l’école.

« Sinon ma grand-mère m’a appris pas mal de choses sur les plantes… Médicinales, toxiques… Mais aussi sur les soins de base, quand j’ai été blessée pour pouvoir refaire les pansements, les sutures si elles craquaient… J’ai de bons restes je pense. »

Ethan acquiesça encore une fois.
Comment imaginer les deux jeunes gens autrement qu’en équipe ? D’un côté, il y avait Jason, poseur de pièges et pas trop mal physiquement bien qu’il ne pouvait faire le poids face aux Carrières, mais plutôt déterminé pour survivre. De l’autre, Chloé qui avait quelques connaissances en soin et était plutôt intelligente.

« Bon, murmura-t-il pour reprendre la conversation, vous êtes complémentaires, ce qui conforte pas mal l’idée dé départ, on n’aura pas à forcer votre relation. »

Le Mentor évita de regarder Chloé. Il soudain que c’était l’idée d’équipe qui semblait la déranger, ce qui le troubla.

« Quant aux entraînements purs et durs, je pense que vous devriez vous concentrer tous les deux sur la survie. Cela ne sert à rien de chercher la confrontation avec les montagnes des premiers Districts, et ils ne sont pas vos seuls ennemis. »

Ethan soupira. Intérieurement, il ne pouvait s’empêcher de se dire que, bien que son arène ait été particulière (comme chaque année où les Juges souhaitaient toujours innover), elle n’était sûrement pas comparable à celle qui allait se présenter et qu’il était bien heureux de ne pas avoir à y mettre les pieds. Et triste d’envoyer ces deux gosses dedans.

« C’est une année d’Expiation, je crains que l’arène soit encore plus à craindre que vos adversaires. »

Il se ressaisit pour continuer son explication.

« Malgré tout, il faut développer ce que vous semblez déjà connaître. Ce ne serait pas trop mal que tu passes un peu de temps en soin Chloé, tu pourrais en apprendre un peu plus et vite, en bonne élève studieuse. De ton côté, Jason, tu peux voir pour la défense au corps à corps, tu n’es pas si gringalet que tu en as l’air. »

Leur passé commun en traque lui revint et il termina pour l’entraînement.

« Allez peut-être faire un tour en chasse, ensemble, vous entraîner par équipe et montrer que vous êtes tout de même soudés. Ca va de paire avec la survie en quelques sortes. »

Une idée lui traversa l’esprit et il conclut ainsi :

« Enfin, si vous le souhaitez, je peux vous enseigner quelques bases en couteau. Pas d’entraînement, cela est formellement interdit hors de la salle, mais je suis persuadé que c’est un outil indispensable. »

La gorge sèche d'avoir tellement parlé, Ethan se servit un verre d'eau. Il avait peut-être un trop écourté la conversation mais les deux Tributs semblaient extenués par cette longue journée. Depuis la Moisson, tout s'était enchaîné si vite qu'ils n'avaient sûrement pas eu l'occasion de beaucoup dormir.

Where we stand together ...

feat Chloé et Ethan ♪

Le cow-boy restait silencieux, Jason espérait en silence qu'il avait saisit les allusions à la chasse de ses propos. Il devait se contrôler pour ne pas lui dire simplement qu'il braconnait en dépit des règles l'interdisant, en dépit de son père pacificateur. Il n'avait pas vraiment besoin de chasser, certains le faisaient par pure nécessité, lui c'était plus un passe temps. Une provocation en quelque sorte, le fils du chef des pacificateurs du district braconnier. C'était aussi grotesque, improbable et surtout impensable qu'un Capitoliens sans froufrou ou paillettes. Mais c'était le cas, son père savait probablement ce qu'il faisait des journées. Où alors il avait cessé de s'y intéresser quand il s'était aperçu qu'il ne s’entraînait pas ou n'étudiait pas pour devenir comme lui, qui voudrait devenir pacificateur. Être certes respecté, mais pas de la bonne manière, par la peur et la soumission. Devenir un homme froid, cruel et sans émotion n'était pas dans ses ambitions avant la moisson et elles ne le serait jamais. Son père avait du attendre, sans rien dire à son fils, sans le dénoncer ou même le châtier lui même, il attendait sûrement la moisson pour que la vengeance et la punition soient plus belles à ses yeux. Il avait réussi son coup, non seulement il s'était débarrassé de son fardeau de fils, mais en plus il le punissait d'avoir enfreint les règles interdisant le braconnage. Ingénieux mais cruel pour un père envers son unique fils.

- Il y a quelques années, nous faisions ces rondes ensemble… Mais il a toujours été plus doué que moi pour vérifier que tout était bien à sa place.

Chloé aussi jouait le jeu d'Ethan, il valait mieux dans un situation pareille, le fait qu'elle évoque les tournées des pièges et les parties de chasse de jadis jeta un froid. Jason n'osa pas évoquer leur passé, à lui et Chloé, le temps où ils étaient heureux, une belle époque révolue par sa faute. Son père avait peut être raison, c'était un bon à rien, un imbécile qui ratait et gâchait toujours tout. Il n'était même pas capable de rester fort dans cette situation désespérer, il ne pourrais jamais la protéger. Il n'avait pas la force qu'il fallait pour le faire ni le courage au passage. Pourtant il se le devait, pour lui, pour elle, pour eux. Et puis il y avait son cœur qui lui murmurait au début mais désormais il lui hurlait « Tu l'aimes pauvre idiot ». Voilà la cause de sa souffrance inexplicable, non pas parce que sa fin était proche, mais parce que c'était sa faute si Chloé était dans cette galère avec un handicap qui plus est. Elle lui avait jeté un regard qui en disait long, l'émotion se lisait dans ses yeux, l'époque de leur si belle amitié l'émouvait aussi. Elle se crispait sur son verre.

-Je me doute qu'un portage peut avoir besoin d'une constante surveillance... la nourriture est une denrée importante qui manque vite.

La confirmation qu'Ethan avait compris les talents de chasseurs de Jason était là, avec du sarcasme pour couronner le tout, Jason reconnaissait bien le cow-boy là, même s'il ne le connaissait que depuis peu. Il avait raison, dans l'arène, la nourriture allait manquer rapidement, savoir poser des pièges était un bon atout, enfin si l'on survivait assez longtemps pour avoir faim.

- Sinon j’ai toujours été très douée en classe, mais je ne pense pas que cela m’aidera là où nous allons… Sinon ma grand-mère m’a appris pas mal de choses sur les plantes… Médicinales, toxiques… Mais aussi sur les soins de base, quand j’ai été blessée pour pouvoir refaire les pansements, les sutures si elles craquaient… J’ai de bons restes je pense.

Elle avait raison, elle était très intelligente, elle obtenait de très bon résultats à l'école que Jason et elle fréquentaient. Elle réussissait brillamment, mais dans l'arène cela ne servirait à rien. Jason se souvenait du jour ou le professeur l'avait interrogé sur le fait de reprendre le poste de son père plus tard, de sa nervosité face à ce piège. Le jour ou tout avait commencé, le début de leur amitié déchue. Chloé l'avait sorti de cette galère, à lui de la sortir de la future qui arrivait petit à petit. La médecine, encore un bon atout. La blessure, il ne préférait pas y penser mais il se sentit coupable et son visage se ferma et il baissa le regard, les yeux fixés sur le sol.

-Bon, vous êtes complémentaires, ce qui conforte pas mal l'idée de départ, on n'aura pas à forcer votre relation.

Jason ne savait pas trop quoi penser, il était vrai que l'évidence était là, il se complétaient plutôt bien, deux moitiés parfaite qui assemblaient ne pouvaient être que plus fortes. Était il heureux de cette complémentarité qui les uniraient ? Probablement, il pourrait ainsi être là pour elle et atténuer les remords et reproches. Qu'elle en ait eu envie ou pas de toute façon, il aurait imposer sa présence, il était hors de question d'envisager de la perdre sans avoir rien fait pour l'empêcher. Ethan évitait de croiser le regard de Chloé, il avait peut être peur que celle-ci s'emporte à l'évocation de stratégie d'équipe, mais elle restait silencieuse et Jason essayait de croiser son regard, puis le cow-boy enchaîna.

- Quant aux entraînements purs et durs, je pense que vous devriez vous concentrer tous les deux sur la survie. Cela ne sert à rien de chercher la confrontation avec les montagnes des premiers Districts, et ils ne sont pas vos seuls ennemis.

Il avait raison, certes il y avait les carrières, menaces principales mais il y avait les autres tributs. Les vainqueurs n'étaient pas seulement issus du 1, du 2 ou encore du 4, même s'ils étaient plus préparés aux barbaries la chance avait et le hasard avait leur place et offrait la victoire à certains, encore fallait il en avoir. Parfois il fallait la provoquer, par exemple en travaillant la survie comme le suggérait Ethan, mais Jason pensait qu'un peu de combat ne lui ferait pas de mal.

-C'est une année d'Expiation, je crains que l'arène soit encore plus à craindre que vos adversaires.

Il avait encore une fois raison, pour les expiations, les juges trouvaient toujours des choses plus cruelles, une arène qui n'offrait généralement pas de cadeaux, meurtrière, toujours plus de spectacle. Personne ne savait précisément à quoi s'attendre, un désert, une banquise, une forêt ? Pas assez extravaguant, trop facile, le degrés de cruauté devait être très haut et il était impossible de deviner ce qui passait dans la tête des juges. Ils étaient dans une situation plus que désespérée, des mentors expérimentés dans l'arène, en plus des 22 des autres districts et pour couronner le tout, une arène pour le moment inconnue mais qui promettait beaucoup de sang et de dangers. Il était impossible de se parer à toutes les éventualités d'arène, il y en avait tellement.

-Je ne sais pas à quoi nous devons nous attendre, mais je sais qu'on ne nous fera pas de cadeaux, encore moins que dans les éditions « normales ».

Puis le cow-boy continua, pour développer sa précédente réplique.

-Malgré tout, il faut développer ce que vous semblez déjà connaître. Ce ne serait pas trop mal que tu passes un peu de temps en soin Chloé, tu pourrais en apprendre un peu plus et vite, en bonne élève studieuse. De ton côté, Jason, tu peux voir pour la défense au corps à corps, tu n’es pas si gringalet que tu en as l’air.

Voilà de bonnes idées, développer ce qu'on savait déjà faire pour être encore meilleur, il fallait être réaliste, Chloé en deux jour ne deviendrait jamais une sprinteuse, pas plus que Jason un combattant redoutable, mais il devait essayer, se rappeler d'un mouvement apprit pendant un combat pouvait toujours être utile. Le fait qu'il souligne sa condition physique l'étonna un peu, du même que le fait que Chloé insistait sur le fait qu'il était meilleur qu'elle du temps de leurs rondes de chasse. Elle se dévalorisait en faisant ça, ou plutôt elle devait essayer de valoriser Jason, pour qu'Ethan se concentre sur lui peut être, ils devraient avoir une discussion plus tard, il était hors de question qu'elle se sacrifie pour lui, elle ne l'aurait pas supporté et se l'aurait reproché tout le reste de son existence.

- Allez peut-être faire un tour en chasse, ensemble, vous entraîner par équipe et montrer que vous êtes tout de même soudés. Ca va de paire avec la survie en quelques sortes.

Oui, montrer aux autres tributs qu'ils étaient une équipe, seulement Jason craignait que faire cet atelier, avec Chloé ne ravive de vieux souvenirs douloureux. Une occasion de tirer un trait sur le passé, s'ils ne le faisaient pas maintenant ils n'en auraient plus le temps.

- Enfin, si vous le souhaitez, je peux vous enseigner quelques bases en couteau. Pas d’entraînement, cela est formellement interdit hors de la salle, mais je suis persuadé que c’est un outil indispensable.

Leur mentor voulait les aider, il faisait de son possible pour qu'ils aient un maximum de chance de s'en sortir, c'était assez présomptueux car c'était quasiment peine perdue, mais cela touchait Jason qu'il se préoccupait de leur sort, le mentor qui dormait dans le train comme si tout cela lui était indifférent était bien loin bien qu'il avait l'air épuisé. Jason n'était cependant pas sûr que lui confier un couteau était très raisonnable, quand bien même il aurait réussi à le manier, face à un humain, un innocent, un enfant, aurait il le cran nécessaire pour abaisser et planter la lame en plein cœur de sa victime Certes il tuait des animaux mais là il était question de tuer des semblables.

-Pourquoi pas, ça peut toujours être utile, mais …

Il aurait voulu parler de ses appréhensions vis à vis de tuer quelqu'un de sang froid, chose qu'il se sentait incapable de faire. Pourtant il décida de se taire, il devrait se convaincre en temps voulu qu'il pouvait le faire, il ne devait pas se montrer faible devant Ethan et Chloé. Avouer ses faiblesses ne devaient pas figurer à l'ordre du jour, il en était certain.

- … non rien. Allez y Ethan, nous ne devons pas prendre de retard, le temps nous est compté.

Faire face...

Le regard d’Ethan me toisait. On parvenait tout à fait à y distinguer un sentiment d’incompréhension qui m’avait l’air destiné. Il est vrai que la Chloé qu’il avait devant lui à ce moment précis était bien différente de celle qu’il avait pu découvrir dans le train. Toutes mes tensions, tous les événements accumulés s’étaient déchaînés en un torrent dont j’avais pris soin qu’il balaye tout sur son passage… Ca ne me ressemblait pas, tout comme être assise ici, dans cette pièce aux meubles bizarres et aux ornements grotesques ne me ressemblait pas : mais je n’avais pas le choix. Pas plus que Jason, assis à mes côtés, ou même ce mentor qui faisait lui aussi son maximum pour sauver les apparences…

- Bon, murmura-t-il pour reprendre la conversation, vous êtes complémentaires, ce qui conforte pas mal l’idée de départ, on n’aura pas à forcer votre relation.

Je faillis soupirer en baissant les yeux mais me retînt au dernier moment. Rien ne servait que ces deux-là voient encore davantage à quel point le fait qu’Ethan nous destine à être en équipe m’angoisse et me révoltait. Ne voyait-il donc pas que je ne serai d’aucune utilité à Jason. Que je ne serai qu’un poids auquel il s’accrochait désespérément ? Je levai un regard dans lequel brûlait une flamme de colère vers Ethan mais j’avais la curieuse impression qu’il s’évertuait à éviter soigneusement chacun de mes essais pour croiser ses pupilles. Sans doute avait-il compris que si cela se produisait, je risquais de me montrer tout aussi véhémente que dans le train…

- Quant aux entraînements purs et durs, je pense que vous devriez vous concentrer tous les deux sur la survie. Cela ne sert à rien de chercher la confrontation avec les montagnes des premiers Districts, et ils ne sont pas vos seuls ennemis.

La confrontation avec les carrières… Il n’imaginait tout de même pas que nous pouvions l’avoir ne serait-ce qu’envisager. Il fallait être au moins un autre carrière pour oser se mesurer à eux et encore… La plupart du temps ils s’alliaient entre eux pour ne pas avoir à s’affronter de prime abord. Si cette espèce de tradition perdurait cette année encore… J’eus un frisson en repensant aux corps musclés et dévoilés des carrières du District Un mais aussi du jeune homme du Quatre, sans compter sur les regards de loups affamés de chair fraîche du District Deux. J’arrivais à peine à chasser ses images de ma tête lorsqu’Ethan soupira à l’évocation des autres dangers qui nous attendaient, tapis dans l’ombre mais tout aussi dangereux.

-C'est une année d'Expiation, je crains que l'arène soit encore plus à craindre que vos adversaires.

La mine du mentor avait pris un coup de vieux en seulement quelques secondes. La tristesse qu’on pouvait y lire était tout aussi terrifiante que le poids de ces mots… Une Expiation… Y avait-il moins bonne année pour être tirée ?

- Je ne sais pas à quoi nous devons nous attendre, mais je sais qu'on ne nous fera pas de cadeaux, encore moins que dans les éditions « normales ».

Jason avait dit tout haut ce que je pensais tout bas. Il avait entièrement raison : nous ne pouvions avoir aucune idée de ce à quoi nous attendre… L’inconnu était sans doute ce qui me terrifiait encore plus que toutes les tortures, tous les pièges et tous les malheurs que je pouvais facilement me représenter dans mon esprit. Ne pas savoir à quoi m’attendre n’était pas une situation que je parvenais à gérer, émotionnellement : j’avais toujours aimé les connaissances, les enseignements sur le monde parce qu’ils me donnaient l’impression de le maîtriser en quelque sorte ou du moins de savoir à quoi m’attendre. Ici, les règles étaient modifiées… Nous n’avions aucune prise sur notre destin. Nous battre, nous entraîner ? Ce n’était que des foutaises ! Après tout, combien de tributs avions-nous vu mourir lors des précédentes éditions alors qu’ils tentaient de fuir un piège déclenché dans l’arène ? Ces pièges n’étaient pas le fruit du hasard non… Ils apparaissaient toujours au bon moment, au bon endroit… Et si la cruauté des habitants du Capitole était telle qu’il n’avait aucun scrupule à faire subir de telles atrocités lors de simples éditions, que nous attendait-il ?

Mes lèvres s’entrouvrirent pour laisser passer un mince filet d’air. J’essayais tant bien que mal et discrètement de réguler ma respiration alors que mon cœur tambourinait avec une force effroyable dans ma poitrine. C’était de la terreur à l’état brut, ni plus ni moins. Nous allions tous les deux dans cet enfer et Jason voulait m’en protéger, c’était complètement idiot… Il n’avait pas le droit.

C’est à ce moment que notre mentor continua la conversation après sa longue pause discursive. La paranoïa m’avait presque gagnée et je me sentais un peu flotter, il fallait à tout prix que je rassemble mes esprits sur ce qu’il disait. Il fallait que je comprenne où il voulait en venir et ce que je pourrais faire afin qu’il conseille à Jason de se recentrer sur lui. Mes paupières se fermèrent un instant pour trouver une sérénité disparue, puis se rouvrirent pour faire face à Ethan.

- Malgré tout, il faut développer ce que vous semblez déjà connaître. Ce ne serait pas trop mal que tu passes un peu de temps en soin Chloé, tu pourrais en apprendre un peu plus et vite, en bonne élève studieuse. De ton côté, Jason, tu peux voir pour la défense au corps à corps, tu n’es pas si gringalet que tu en as l’air.

Je hochai la tête affirmativement lorsqu’il me proposa d’aller m’entraîner en soin. Rien ne servait de s’opposer à ses conseils, surtout si je désirais lui demander quelque chose par la suite. Et puis, je n’aurais pas la force de simplement rester dans un coin pendant les entraînements en attendant ma mort probable dans quelques jours, sans compter que je désirais faire de mon mieux pour respecter ma promesse sans risque pour Jason. Le but même de la stratégie que nous avait conseillée notre mentor était de faire profil bas devant les autres tributs, de nous montrer inoffensifs… Je me sentais tellement peu à l’aise avec cela. J’avais tant envie de me raccrocher au peu d’espoir qu’il restait et qui filait chaque seconde un peu plus loin, de montrer que je n’étais pas cette gamine de dix-neuf ans, vulnérable, que tous devaient voir en moi. Mais ce n’était pas une bonne option.

Jason irait au corps à corps. Il n’était pas si gringalet, cela était bien vrai. Cependant, je ne me l’imaginais pas en train de frapper quelqu’un… Surtout à mains nues. Les armes créaient une distance rassurante lorsqu’on les utilisait, du moins c’était comme ça avec nos pièges et collets ou encore les quelques fois où j’avais tiré avec l’arc d’Alisson. Je ne me serais jamais imaginé frapper un animal, de mes mains, jusqu’à la mort… Planter un couteau dans son flanc peut-être… Mais là nous ne parlions pas de chasse, nous parlions d’humains. De gens comme nous, avec une famille, des amis, une vie… Je ne savais si je parviendrai à être capable d’un tel geste… Quant à Jason, je n’arrivais pas à me l’imaginer ainsi… Il n’était pas comme ça. Il n’était pas ce que son père avait toujours voulu qu’il soit. Il avait lutté contre cela toute sa vie et voilà que ce mentor lui demandait d’abdiquer. J’eus envie de laisser glisser ma main vers la sienne, pour le soutenir, mais m’en retînt : cacher mes sentiments, voilà tout ce qu’il me restait à faire si je ne voulais pas lui donner encore plus de raison de faire une bêtise irréparable.

Allez peut-être faire un tour en chasse, ensemble, vous entraîner par équipe et montrer que vous êtes tout de même soudés. Ca va de paire avec la survie en quelque sorte. ajouta soudainement le mentor alors qu’une lueur pétillait dans ses yeux. A nouveau, il marqua une pause avant de conclure sur une proposition : Enfin, si vous le souhaitez, je peux vous enseigner quelques bases en couteau. Pas d’entraînement, cela est formellement interdit hors de la salle, mais je suis persuadé que c’est un outil indispensable.

Travailler ensemble. Décidément, ce mentor n’allait pas me faciliter la tâche. Même si j’avais le cœur gros d’avoir pris cette décision insensée, je prenais conscience peu à peu que si je ne parvenais pas à faire comprendre à Ethan, d’une façon ou d’une autre, que je ne désirais pas être sauvée alors rien de ce que je ne ferais n’aurait de sens… Il fallait qu’il arrête de croire que nous pouvions être ensemble, qu’il arrête de nous torturer ainsi, de nous plonger dans des souvenirs heureux, de nous faire miroiter une relation que nous aurions pu avoir et que nous n’aurions jamais. Mon regard croisa le sien un bref instant : dans le mien devait se refléter toute la souffrance que je ressentais en cet instant et qui me dévorait sans scrupule.

- Pourquoi pas, ça peut toujours être utile, mais … finit par lâcher Jason sur un ton hésitant.

En me tournant vers lui, je voyais bien qu’il n’allait pas bien du tout. Cette conversation l’avait complétement retourné. Il paraissait très pâle, presque livide. Est-ce l’idée de notre entraînement à deux, la mention du couteau ou plutôt celle de devoir assassiner des gens comme nous qui le faisaient ainsi tressaillir ? J’avais tellement envie de lui dire que je le comprenais, qu’il n’était pas seul… Mais il fallait que je me taise, c’était pour son bien. Il fallait que je me répète cette phrase : c’était pour son bien.

… non rien. Allez y Ethan, nous ne devons pas prendre de retard, le temps nous est compté. termina-t-il toujours aussi peu assuré.

Je me mordis la lèvre inférieure. Le temps nous était compté. Des mots posés sur cette réalité m’angoissaient encore davantage, je me contrôlais néanmoins bien mieux que dans le train. En y réfléchissant, je n’en avais d’ailleurs pas le choix.

- Cela me va pour les entraînements, c’est « logique » quand on n’y pense. dis-je d’un ton neutre avant de reprendre : Pour le couteau… c’est une bonne idée mais je préfère être honnête, j’en manipule pas mal à la boulangerie pour trancher le pain et tout cela, mais je ne suis pas certaine de pouvoir m’en servir pour…autre chose.

Finalement, malgré tous mes efforts, je n’avais pas réussi à formuler ma pensée à haute voix. Penser que je puisse être responsable de la mort de quelqu’un m’horrifiait et pourtant, si je voulais être fidèle à mes engagements, à mon choix, il allait falloir que je change. Le temps des douceurs de notre District, aussi pauvre et malheureux soit-il, était désormais bien loin… Je me souvenais d’un cours pendant lequel Mme Lagan nous avait appris que les animaux, à l’approche d’un danger imminent suivaient leurs instincts les plus primaires. Le plus adorable des chiens pouvait se transformer en un cabot hargneux. Le plus calme des chevaux se ruer sur vous sans vergogne jusqu’à vous écraser de ses sabots.

Etions-nous pareils ?

Ethan écouta Jason d’une oreille attentive.

« Pourquoi pas, ça peut toujours être utile, mais… »

Avec ce mot en suspension, Jason attira l’attention de sa coéquipière et de son Mentor. Son hésitation dura un instant, pendant lequel l’aîné l’observa silencieux en ayant son idée pour ses pensées. Mais avait-il le choix ? Avaient-ils tous les deux le choix ? Bien sûr, ils en mourraient, alors ils valaient mieux qu’ils se jettent de la plateforme avant la fin du compte à rebours. Ethan souffla doucement à cette pensée et écouta le jeune homme mettre un terme à sa réflexion et apporter une réponse, pas forcément la meilleure mais celle qui faisait avancer les choses.

« …non rien. Allez y Ethan, nous ne devons pas prendre de retard, le temps nous est compté. »

Le Mentor aurait aimé lui dire combien il était désolé de leur infliger cela, que ce n’était même pas de sa faute à lui. Mais c’était inutile et, de plus, ses expériences de sympathie dans le train ne s’étaient pas forcément bien terminées alors il se tut et ce fut au tour de Chloé de prendre la parole.

« Cela me va pour les entraînements, c’est « logique » quand on n’y pense. Pour le couteau… c’est une bonne idée mais je préfère être honnête, j’en manipule pas mal à la boulangerie pour trancher le pain et tout cela, mais je ne suis pas certaine de pouvoir m’en servir pour… autre chose. »

C’était tout à fait normal que cela les chagrinât de tuer. Si seulement ils avaient pu en discuter dans le train… Cela aurait été du temps gagné, qu’ils perdaient là maintenant. Mais soit, on n’y pouvait rien, il fallait faire avec.

« Je ne pensais pas à tuer… Ce sera votre ami le plus fidèle. »

Ethan porta son regard sur les toits illuminés du Capitole encore visibles par la fenêtre avant de fixer les deux jeunes gens épuisés devant lui.

« Avec un simple couteau, vous êtes armés pour survive. Vous pouvez construire un abri, tailler dans le bois, préparer des pièges. Faire vos propres armes si vous en avez besoin. »

Ethan enchaîna.

« Et tuer. Si ce n’est par attaque, il faudra vous défendre, que ce soit avec ce couteau ou les armes que vous aurez faites avec. N’hésitez jamais à le prendre en main… N’hésitez jamais à l’utiliser. »

Ethan sentit qu’ils n’étaient pas plus réceptifs que celui et vit les valises sous leurs yeux. Ils étaient extenués. Ca commençait à faire beaucoup de choses d’un coup, et ils étaient assez intelligents pour ne pas se soustraire à leur Mentor. C’était à lui de faire l’effort.

« Enfin, c’est pas grave, je pense que vous avez bien plus besoin de vous reposer que d’écouter les conseils de votre Mentor. C’en est assez pour ce soir. Filez vous reposer, on aura assez de temps pour discuter ces prochains jours… Par contre vous n’aurez pas assez de nuit pour vous reposer. »

L’ancien Vainqueur s’assit lentement, fixant ses Tributs, insistant.

« Vraiment. Allez vous reposer. Et passez une bonne nuit. »

Les Tributs partis, Ethan posa son coude sur la table et retint sa tête. Il était fatigué mais n’avait aucune envie de dormir. Non ce n’était vraiment pas le bon plan, pas pour ces gosses, s’il pouvait rester debout et trouver un truc. Il resterait là jusqu’à avoir une meilleure idée que regarder les lumières de la capitale.